Harmonie universelle

Complete title: 
Harmonie universelle contenant la pratique et la théorie de la musique
Year (text): 
1636
Editor: 
Sébastien Cramoysi
Place: 
Paris
Modern editions: 
Paris: CNRS, 1965 (introd. François Lesure)
Edition used: 
Paris: CNRS, 1965

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Volume: 
C. Cons., I, 01
Page: 
005
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2

COROLLAIRE I. Si l'on entend la derniere figure de cette proposition, & particulierement la 2 colomne qui contient les moindres nombres, l'on pourra restituer toute la Musique, encore qu'elle fust perduë ; et l'on sçaura mieux la Theorie que tous ceux qui nous ont precedez, & qui en ont escrit : car le moindre nombre exprime le nombre des battemens de l'air, qui font le son d'vn tuyau d'Orgue de 8 pieds ; & le plus grand nombre signifie le moindre des battemens du tuyau d'vn pied : d'où l'on peut conclure le nombre des battemens que font les autres sons de la Vingt-deuxiesme, & mesmes ceux qui sont necessaires pour faire tel son que l'on voudra.

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Volume: 
C. Cons., I, 08
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034
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1

PROPOSITION VIII. A sçauoir si les moindres raisons prennent leur origine des plus grandes, ou les plus grandes des moindres ; & consequemment si les moindres interualles de la Musique, comme les tons & les demitons, viennent des plus grands, par exemple de l'Octaue, ou si l'Octaue prend son origine desdits interualles.

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Volume: 
C. Cons., I, 08
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034
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2

Cette difficulté [de savoir si les moindres raisons prennent leur origine des plus grandes ou bien le contraire] n'est pas la moindre de la Musique, car il y en a qui tiennent que les plus grandes raisons, par exemple les multiples dependent & prennent leur origine des moindres, c'est à dire des surpaticulieres, ou surpartientes, & consequemment que l'Octaue depend de la Quinte & de la Quarte, comme la raison double de la sesquialtere & de la sesquitierce, quoy que plusieurs autres soient de contraire aduis. Or ceux-là se fondent premierement sur ce que les plus grandes raisons & Consonances sont semblables aux grands nombres qui sont composez des moindres, & qui dependent de l'vnité : De là vient que le nom des Consonances est pris des nombres dont elles sont composees ; c'est pourquoy il semble que l'vnité doiue leur seruir de mesure commune, car les Tierces, la Quarte & la Quinte sont ainsi appellees à raison de leurs trois, quatre, ou cinq sons : & puis les petits interualles sont deuant les plus grands, comme l'vnité est deuant les nombres.

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C. Cons., I, 08
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034
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3

Secondement les lignes prennent leur origine des points, & les figures des lignes, et non au contraire. Or les Consonances sont semblables aux figures ou aux lignes, & les tons ou demitons dont elles sont composees sont semblables aux lignes ou aux points : d'où il s'ensuit que les Consonances dependent des moindres interualles, & consequemment que les moindres interualles sont plus simples que les plus grands.

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Volume: 
C. Cons., I, 09
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039
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1

PROPOSITION IX. Determiner si l'accord dont la raison est de deux à vn est bien appellé Octaue, ou si l'on doit plutost luy donner vn autre nom, comme celuy de Diapason.

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C. Cons., I, 09
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039
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2

Il est a propos de parler de cette difficulté [déterminer si l'accord dont la raison de deux à un est appellé Octave ou Diapason], puis que nous essayons de rapporter la raison de tout ce qui se rencontre dans la Musique, dont le Diapason est l'vne des plus excellentes parties, que les Grecs ont appellé Διάπασω̃ν, parce qu'il comprend toutes les simples Consonances & les Dissonances.

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C. Cons., I, 09
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039
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3

Mais il semble que le nom d'Octaue que l'on luy a donné ne luy conuient pas trop bien, dautant que la raison double peut aussi bien estre diuisee en dix ou en plusieurs sons comme en huit, & qu'en effet elle est diuisee en 25 chordes ou sons dans le genre Enharmonique, & en 16 dans le Chromatique, comme nous dirons apres : mais l'on respondra peut-estre qu'elle n'a que huit sons au genre Diatonic qui est le naturel & le premier de tous les genres. Ce qui ne demeurera pas sans replique, dautant que ce genre doit auoir neuf sons pour estre parfait.

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Volume: 
C. Cons., I, 09
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039
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4

D'ailleurs, le genre dont on se sert maintenant aux compositions des Motets & des Airs a 19 chordes, ou 18 interualles, comme ie monstreray au liure des differentes notes, & de tous les characteres dont on peut vser en composant, soit pour chanter, ou pour ioüer sur les Instrumens. Il faut donc voir quel nom l'on luy [le diapason] peut donner, & s'il est plus à propos de l'appeller Neufiesme, ou Seiziesme, ou de quelqu'autre nom, pour les raisons que ie viens de deduire.

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Volume: 
C. Cons., I, 09
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039-040

Car i'ay de la peine à croire que tous les anciens Latins & François, & tous nos voisins luy [le diapason] ayent donné ce nom sans raison, lequel ils ont peu prendre du nombre ordinaire des sons, que les Grecs & les Musiciens des autres nations ont mis dans l'Octaue selon nos notes ordinaires, Ut, re, mi, fa, sol, re, mi, fa, ou suiuant [p040] les nouuelles, Bo, ce, di, ga, lo, ma, ni, bo, dont nous parlerons dans vn autre lieu.

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C. Cons., I, 09
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040
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1

Car bien que les compositions que l'on fait maintenant ayent besoin de 9 ou 12 chordes, comme sont celles de la Viole, du Luth, de l'Epinette ; ou de 16, de 19, ou de 25, comme ie diray ailleurs, neanmoins cela n'oste pas le nom à l'Octaue, dont il y a d'autres raisons, quand on ne les prendroit que des effets du nombre de huit qui a d'admirables rencontres dans la Musique, puis qu'il n'y a que huit accords & huit raisons qui les contiennent, à sçauoir l'Vnisson qui contient la raison d'egalité ; le Diapason dont la raison double est la premiere des multiples ; la Quinte qui contient la premiere des raisons surparticulieres, que l'on appelle Sesquialtere ; la Quarte qui a la sesquitierce, que les Grecs appellent Epitritos ; la Tierce majeure qui comprend la Sesquiquarte ; la Tierce mineure qui a la Sesquiquinte ; la Sexte majeure qui contient la Surbipartiente-trois ; et la Sexte mineure qui a la Surtripartiente-cinq : à quoy l'on peut ajoûter que le nombre huit represente le premier cube dont la racine est deux, & la beatitude qui est signifiee par l'Octaue, car plusieurs Psalmes ont pro octaua dans leur inscription, particulierement quand ils parlent de la beatitude, comme sainct Ambroise a remarqué au cinquiesme liure qu'il a fait sur le sixiesme chapitre de sainct Luc.

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Volume: 
C. Cons., I, 09
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040
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2

A vray dire les raisons que l'on peut rapporter pour l'vne & l'autre des deux opinions pourroient tenir vn esprit en balance, & faire donner vn autre nom à l'Octaue, si la longueur du temps n'auoit graué cette diction dans l'esprit des Musiciens, en faueur desquels ie monstre qu'il faut appeller cét accord Octaue.

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Volume: 
C. Cons., I, 09
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040
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3

Les arts ne peuuent iamais mieux proceder que quand ils imitent la nature, dont les sciences considerent les actions : les noms qui expriment le mieux ses effets sont les mieux donnez, & les mieux imposez. Or les sons qui ne consistent que dans les mouuemens de l'air, ne peuuent mieux estre distinguez par aucune difference interne, ou qualité exterieure, que par le graue & l'aigu ; ce qui apporte vne grande confusion : car supposant vn ton graue, tous les autres tons iusqu'à l'infiny seront aigus, & supposant vn aigu tous les autres seront graues ; c'est pourquoy les Musiciens ont osté contraints de dire le second d'apres le graue ; comme le troisiesme, le quatriesme, le cinquiesme, le sixiesme, le septiesme, & le huitiesme. Ils eussent passé outre, comme les Arithmeticiens ont monté iusques à dix : mais considerans tous ces sons, ils ont trouué que le second d'apres le graue ne faisoit rien qui fust bon ; ils l'ont passé, & remarqué comme nuisible : ils ont trouué que le troisiesme se mesloit aisément auec le graue, & qu'en le tenant plus foible ou plus fort il auoit toujours de l'harmonie, & ont appellé le foible Tierce mineure, & le fort Tierce maieure. Ils sont venus à considerer le quatriesme son aigu d'apres ce mesme son graue, & l'ont trouué bon. Et puis ils ont consideré le cinquiesme qu'ils ont encore trouué meilleur, parce qu'il fait vn meslange plus parfait que le quatriesme, & plus ferme que le troisiesme : mais il ne peut estre plus haut ny plus bas qu'il faut. Ils ont aussi consideré le sixiesme, & l'ont trouué de mesme nature que le troisiesme, & qu'il pouuoit estre plus fort ou plus foible sans estre des-agreable, c'est pourquoy ils l'ont appllé Sexte mineure, & majeure.

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Volume: 
C. Cons., I, 09
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040-041

Quant au septiesme son d'apres ce graue, ils l'ont trouué de mesme nature que le second, & l'ont mis au rang de ceux dont il ne falloit rien esperer de bon. [p041] Mais ayant consideré le huictiesme ils l'ont trouué si semblable au graue, qu'il est plustost le mesme qu'vn autre. Or apres auoir consideré tous les autres qui suiuent, ils ont trouué qu'ils faisoient le mesme effet contre le 8, que les precedens contre le graue, aussi ils se sont arrestez à ce 8, & ont creu que se seroit en vain de proceder plus auant, puis que l'on peut suffisamment considerer tous les effets des sons dans l'estenduë de ces huit premiers tons, & tenans pour certain que tout ce qui arriue aux sons qui montent par dessus l'Octaue, est semblable à ce qui arriue à ceux qui sont au dessous, ils ne leur ont peu bailler de noms qui les designassent mieux que ceux de leur situation de Seconde, Tierce, Quarte, Quinte, Sexte, Septiesme, & Octaue, lesquels on ne peut changer sans mettre vne confusion dans la connoissance ordinaire de la Musique Pratique.

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C. Cons., I, 09
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041
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1

Quelques-vns croyent que de l'appeller [l'octave] Diapason, comme ont fait les Grecs, c'est donner vn nom general à vne chose particuliere, & le nom du genre à l'espece ; & que les facteurs d'Orgues & d'Epinettes ont mieux appellé leur clauier, ou la mesure de leurs tuyaux & de leurs chordes du nom de Diapason, qui contient quarante & neuf marches, chordes, ou tuyaux pour faire autant de tons, à sçauoir 29 qui vont par degrez naturels pour faire quatre Octaues, & vingt autres qui seruent pour faire les Tierces mineures en de certains endroits (comme il sera expliqué dans le troisiesme liure de l'Epinette) & les majeures en dautres, & pour trouuer les Sextes majeures ou mineures, & les Quintes parfaites aux endroits où elles se doiuent rencontrer, quand on passe d'vne Octaue à l'autre ; car ce clauier contient tous les tons par le moyen desquels l'on peut faire toutes sortes de chants simples, ou d'accord, qui peuuent estre agreables à l'oüye, ou à l'entendement qui en iuge. Quant aux autres diuisions des sons elles ne sont pas naturelles, puis que nulle oreille ne s'y plaist : & comme la nature a mis des bornes à la mer que tous les flots les plus orageux ne peuuent outrepasser, aussi nul entendement humain ne peut faire qu'vne fausse Quinte, c'est à dire moindre qu'elle ne doit estre, ou qu'vne fausse Octaue puisse donner du plaisir, dautant qu'il ne peut passer les bornes que la nature a prescrit aux tons sans renuerser la nature.

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C. Cons., I, 09
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041
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2

Les Organistes ont passé plus outre que l'Octaue, & ont ajoûté la Dixiesme, la Douziesme, la Quinziesme, &c. ce qu'ils ont fait pour designer les marches de leur clauier ; car cette Dixiesme est seulement vne Tierce plus haute que la premiere, c'est à dire repetee ; & cette Douziesme est vne Quinte à l'Octaue de la premiere Quinte. Voila donc pourquoy l'on peut dire que le mot d'Octaue, dont se seruent nos Musiciens, est plus propre & plus significatif que le mot de Diapason, dont on vse plus à propos pour signifier les vingt-neuf tons des Instrumens que les huit sons de l'Octaue.

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Volume: 
C. Cons., I, 09
Page: 
041-042

Neanmoins de tous les autres noms que l'on peut donner à l'Octaue, celuy des Grecs [le diapason] est l'vn des plus propres, & puis il est déja receu, car l'on sçait que le Diapason signifie l'Octaue, ou l'accord qui contient tous les simples interualles de la Musique, comme le nombre denaire contient tous les nombres ; car ceux que l'on ajoûte à dix ne sont que repetitions des autres nombres qui le precedent, comme les sons que l'on ajoûte à l'Octaue ne sont que les repetitions de ceux qui la precedent.
L'Octaue peut donc estre appellee Diapason, puis que cette diction Grecque [p042] signifie par tous, dautant que l'Octaue comprend tous les sons, comme la lumiere toutes les couleurs, le cercle tous les plans, & la sphere tous les corps ; car si la lumiere produit toutes les couleurs par les differentes diuisions ou conjonctions de ses rayons (comme l'on voit dans l'arc en ciel) & la sphere tous les corps, l'Octaue produit aussi toutes les Consonances & les Dissonances par ses differentes diuisions.

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Volume: 
C. Cons., I, 09
Page: 
042
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1

Ces raisons ont empesché les Grecs d'appeller l'Octaue δἰ ἑπτα, c'est à dire par sept, encore qu'elle n'eust que sept chordes du temps de Terpandre, ou qu'elle n'ait maintenant que sept interualles naturels ; & de la nommer δἰ ἀκτώ, c'est à dire par huit, bien quelle contienne huit sons, & qu'ils ayent donné des noms à la Quinte, & aux autres Consonances qu'ils ont pris du nombre de leurs chordes, ou de leurs sons : dautant que les anciens ne mettoient que sept chordes à leurs Instrumens, comme remarque Aristote au 32 probleme de la 19 section, afin que les sept planettes eussent leurs sieges sur les chordes des Instrumens ; car la plus grosse representoit le mouuement de Saturne qui est le plus lent, & la plus deliee representoit la Lune comme la plus viste ; & celle du milieu, dont Aristote parle si souuent, comme au probleme 20, 25, 30, & 45, representoit le Soleil. L'Octaue peut donc estre nommee Diapason, puis que nous iugeons de toute la Musique par l'Octaue, comme nous iugeons d'vn bastiment entier par son fondement, et que l'on peut restablir la Musique par sa seule connoissance, comme tout l'edifice par celle de son fondement. Et puis les Facteurs d'Orgues & d'Epinettes reglent tout leur clauier sur vne mesme Octaue, qu'ils prennent ordinairement vers le milieu, comme ie diray en parlant de l'industrie dont il faut vser pour accorder l'Orgue & l'Epinette.

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C. Cons., I, 09
Page: 
042
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2

L'on pourroit encore appeller cét accord [l'octave] Consonance doublee, parce qu'elle est comme vn redoublement de l'Vnisson, qu'elle repete & qu'elle represente à l'oreille & à l'imagination, comme l'image represente son prototype, & qu'elle est contenuë & produite par la raison double qui est de deux à vn.
Le Diapason est encore connu aux Fondeurs de cloches, dont la mesure s'appelle Diapason, ou brochete, qui leur sert pour faire les cloches de toutes sortes de grandeurs, comme ie monstreray dans le liure des Cloches. Le mesme nom se peut aussi appliquer aux mesures des autres artisans, & à tout ce qui contient & qui mesure plusieurs choses.

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Volume: 
C. Cons., I, 09
Page: 
043
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1

Philolaüs Pythagoricien appelloit le nombre 8, Harmonie Geometrique, parce qu'il comprend toutes les raisons des simples accords, car la Sexte mineure estant de 5 à 8 n'a que 8 pour son plus grand terme ; ou plutost parce qu'il contient le plus plus grand systeme qui a trois Octaues, dautant que les anciens n'ont pas mis la Sexte mineure au nombre des accords.

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Volume: 
C. Cons., I, 09
Page: 
043
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2

Mais ie parleray encore de l'Octaue en expliquant si sa raison est de deux à vn, ou à 4, ou à 8, & du nombre des tons qu'elle contient ; i'ajoûte seulement que l'on peut tirer vne nouuelle raison pour le nom de l'Octaue, de la proportion qui se garde aux tuyaux d'Orgues, & aux cloches qui font l'Octaue, car le poids & la solidité du plus grand tuyau, ou de la plus grande cloche est octuple du poids & de la solidité du moindre tuyau, & de la moindre cloche. Il faut donc retenir le nom d'Octaue pour signifier le meilleur & le plus agreable accord de la Musique, sans neanmoins rejetter le nom de Diapason.

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Volume: 
D. Inst., III, 01
Page: 
101
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1

LIVRE TROISIESME DES INSTRVMENS A CHORDES.
PREMIERE PROPOSITION. DETERMINER QVELLE EST LA MATIERE, la figure, l'accord & l'vsage de l'Epinette.

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D. Inst., III, 01
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101
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2

L'Epinette tient le premier, ou le second lieu entre les Instrumens qui sont harmonieux, c'est à dire qui expriment plusieurs sons ensemble, & qui chantent plusieurs parties, & font diuerses consonances ; ie dis le premier, ou le second lieu, parce que si on la considere bien, & si l'on iuge de la dignité des Instrumens de Musique par les mesmes raisons que l'on iugeroit de la bonté des voix, sans doute on la preferera au Luth, qui est son Compediteur ; mais la commodité du Luth, sa bonne grace, & sa douceur luy ont donné l'auantage.

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Volume: 
D. Inst., III, 01
Page: 
101
Sequence: 
3

Or pour parler comme il faut de l'Epinette, nous deuons considerer sa matiere, sa figure, ses parties, ses chordes, ses sons, son harmonie & son vsage tant ez concerts, que lors qu'elle est consideree toute seule, ce que nous ferons succinctement, & le plus clairement qu'il nous sera possible.
Quant à la Matiere, il faut considerer trois choses aux Instrumens à chorde, & comme les Anatomistes diuisent le corps humain en la teste, au thorax & aux membres, dont la teste est le siege de la raison, & le domicile des sens, & le thorax est le lieu des parties vitales, aussi peut-on diuiser toute sorte d'Instrumens de Musique en corps, en table & en manche, comme font les ouuriers.

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Volume: 
D. Inst., III, 01
Page: 
101
Sequence: 
4

Le Corps du Luth est ce que l'on appelle les éclisses, le dos, ou la donte du Luth : mais en l'Epinette, c'est le coffre, qui se peut faire de toute sorte de bois : encore que l'experience & la raison ait appris aux ouuriers qu'il faut faire vne grande distinction entre les bois, parce qu'ils desirent d'estre employez & maniez diuersement, car les plus poreux, & les plus resineux, & qui par consequent tiennent plus de l'air, ont d'autres vsages en la fabrique des Instrumens que ceux qui sont plus denses, plus materiels & plus terrestres.
Il faut donc que l'ouurier ait esgard à deux choses quand il fait les Instrumens, à sçauoir à l'harmonie ou resonance de l'Instrument, & à la force & solidité, qui sont deux choses qui demandent le bois contraire en qualité, car l'harmonie le demande delié, & consequemment fragile, & sujet à se dementir, & la solidité le demande espais & grossier, or ce qui est grossier est sourd.

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Volume: 
D. Inst., III, 01
Page: 
101-102

Et les ouuriers qui donnent beaucoup de son aux Epinettes, les rendent de peu de duree, de là vient qu'il y faut perpetuellement trauailler ; & ceux qui les font trop massiues, les rendent sourdes & incommodes. Par consequent si l'on veut faire le corps de l'Epinette, il faut imiter la nature en la structure de l'animal, qui fait les os durs & grossiers pour le soustien du corps, & les muscles molets & delicats pour l'vsage des mouuemens. [p102]
Les deux barres du trauers, & tous les sommiers sont au lieu des os, & les quatre ais qui doiuent estre deliez, sont au lieu des muscles.
Quant aux sommiers ils sont ordinairement de bois de hestre, par ce que ce bois est bien dur & bien liant, ce que n'ont pas le buys, l'ebene, l'iuoire ou les autres bois durs.
Les ais du costé sont de tillot, ou de quelqu'autre bois blanc, afin que l'Epinette soit plus legere : autrement ils peuuent estre de tel autre bois que l'on veut, pourueu que l'espaisseur soit proportionnee à la dureté du bois, car le plus dur & le plus solide doit estre plus delié, & le plus tendre doit estre plus espais, afin qu'ils fassent autant de corps l'vn que l'autre.
Le fonds peut aussi estre de tel bois que l'on voudra, mais les ouuriers le font de sapin aux grandes Epinettes, & le font espais d'vn doigt, afin qu'elles soient plus legeres & plus portatiues.

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Volume: 
D. Inst., III, 01
Page: 
102
Sequence: 
1

Quant à la table [de l'Epinette], elle doit estre de bois resineux, comme de cyprez ou de cedre, & principalement de sapin, qui est le plus estimé de tous les bois pour cet vsage. Son espaisseur est d'vne ligne ou enuiron, & quand elle est bien collee & appuyee sur les tringles ou sommiers, c'est elle proprement qui compose l'instrument, car si l'on tend des chordes sur vne table de sapin de cette espaisseur, elle rend du son, encore qu'il n'y ait derriere ou dessus nulle boëte, nul coffre, ou corps d'instrumens, le reste ne seruant quasi que pour la tenir en estat, afin qu'elle puisse supporrer la tension des chordes.
Toutesfois les parois d'alentour en augmentent le son, & luy donnent quelque qualité, en le rendant plus doux, plus aigre, plus perçant, plus creux, ou plus sec, & mieux prononçant qu'il ne seroit autrement.

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Volume: 
D. Inst., III, 01
Page: 
102
Sequence: 
2

Que si quelqu'vn demande si en faisant la table de bois de chesne, l'instrument [l'Epinette] n'auroit point de son, il luy faut respondre qu'il en auroit, pourueu que les parrois & le fonds de l'instrument fussent plus espais, & plus forts qu'à l'ordinaire, & que les chordes fussent beaucoup plus grosses, plus longues & plus fortes. Neantmoins le son seroit peu intelligible, & au dessous de la portee de la voix.
Car il faut que les chordes ayent la force d'ébranler la table de l'instrument, & l'air qui est au derriere, pour rendre du son ; par consequent si la table est bien solide, il faut que la chorde soit bien forte : & si la table est immobile elle ne fera point de son.

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D. Inst., III, 01
Page: 
102
Sequence: 
3

L'on peut dire la mesme chose de toute autre sorte de matiere, comme du metal, des pierres, du verre, qui auroient par dessus le bois de chesne, qu'il seroit mal aysé de les assembler, à raison que ces matieres ne se lient pas bien ensemble : & tout au plus on pourroit faire vne meschante Epinette auec beaucoup de temps, d'industrie, de peine & d'argent : comme il est arriué à celuy de nostre temps, qui a fait vn tres-beau Luth d'or, & peu bon.
La table des Epinettes doit estre percee de plusieurs ouuertures arrangees en escharpe, ou en biais tout au trauers d'icelle pour faire passer les sautereaux qui touchent les chordes pour les faire trembler & sonner.

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Volume: 
D. Inst., III, 01
Page: 
102-103

La prominence qui excede le corps de l'instrument, & qui semble continuer ledit corps en droite ligne, est appellee le manche par les ouuriers, & ioüeurs d'instrumens, & sert pour estendre les chordes dessus, afin qu'elles [p103] ayent vne longueur suffisante, & que le Musicien pose les doigts dessus pour faire faire diuersitez de tons à vne mesme chorde ; or il y a autant de cheuilles au bout des manches qu'il y a de chordes sur l'instrument, afin qu'on les puisse hausser ou baisser à volonté, comme l'on void au luth, aux violes, aux mandores, aux guiterres & aux violons […]

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Volume: 
D. Inst., III, 01
Page: 
103
Sequence: 
1

[…] Et bien que l'Epinette semble manquer de manche, sa figure estant toute d'vne venuë & vniforme, & n'ayant aucune prominence, neantmoins si nous considerons l'vsage du manche, nous treuuerons que le sommier qui reçoit les cheuilles, fait le mesme office que la queuë du manche fait au luth ; & les Clauecins ont vne queuë quasi toute semblable ; finalement ledit sommier a deu estre vn manche continu & vniforme à la table, à raison de la multitude des chordes.

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Volume: 
D. Inst., III, 01
Page: 
103
Sequence: 
2

Nous parlerions icy des chordes de l'Epinette, de la matiere dont elles doiuent estre faites, & de leurs grosseurs, longueurs & tensions : mais il faut premierement expliquer comme elle doit estre touchee, car encore que l'on fasse l'archet qui sert à toucher la Viole ou le Violon, apres qu'ils sont montez de leurs chordes, il n'en est pas de mesme de l'Epinette, dont il faut faire le clauier, & les sautereaux qui luy seruent comme d'archet, auant que de poser & de coller la table en sa place.

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Volume: 
D. Inst., III, 01
Page: 
103
Sequence: 
3

Or ce que l'on appelle le Clauier en l'Epinette, est composé de plusieurs morceaux de bois longs & plats par le bout, qui sont arrangez selon l'ordre des tons & des demy tons de Musique, & se meuuent de haut en bas entrans dans le corps de l'Epinette ; & sur l'extremité du bout, qui est caché au dedans, il y a vn autre petit morceau de bois qui sert à toucher les chordes, & qui se nomme sautereau, à cause de son vsage, car il saute quand on iouë de l'Epinette.

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D. Inst., III, 01
Page: 
103
Sequence: 
4

Quant au clauier, il a esté ainsi nommé à cause qu'il contient toutes les clefs de la Musique : mais il est difficile de l'expliquer, & malaisé à comprendre à ceux qui n'en ont point veu, c'est pourquoy i'en donneray la figure dans les Propositions qui suiuent.
Or l'on donne telle figure que l'on veut à l'Epinette, car il en arriue de mesme qu'aux horloges scioteriques, ou au Soleil, que l'on peut tracer & descrire de telle figure que l'on veut, sans preiudicier aux heures que l'on y a marquees.

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Volume: 
D. Inst., III, 01
Page: 
103
Sequence: 
5

Mais pourueu que la figure de l'Epinette ne nuise point à la disposition des chordes necessaires, il importe fort peu qu'elle soit ronde, quarree, en ouale, ou parallelogramme, qui est sa forme ordinaire. Et la largeur de ce quarré longuet, ou parallelogramme est d'vn pied & demy ou enuiron, & sa longueur selon que l'on veut allonger la chorde, & baisser le ton auquel on la veut mettre. Certainement il ne seroit pas inutile de rechercher la figure la plus propre de toutes pour ayder les sons, & d'experimenter si la ronde, qui a tant de priuileges és autres choses, seroit la meilleure pour cet effet : ce qui se peut aussi rechercher pour la figure des autres instrumens, mais i'en laisse la curieuse recherche aux ouuriers.

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Volume: 
D. Inst., III, 01
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103-104

Les chordes de l'Epinette sont pour l'ordinaire de leton & d'acier, car de 49. chordes que l'on tend sur l'Epinette commune, les 30. premieres ou plus grosses sont de leton, & les autres plus deliees sont d'acier ou de fer, parce qu'elles montent plus haut que celles de leton, encore qu'elles leurs soient esgales en longueur & grosseur, comme nous auons remarqué au discours de la difference des sons que font les chordes de toutes sortes de metaux. [p104]
On peut aussi mettre des chordes de boyau, de soye, d'or & d'argent sur l'Epinette, mais l'on experimente que celles de boyau ne sont pas si propres que celles de leton, parce qu'elles changent trop facilement de ton en temps sec & humide, & ne sont pas si vniformes & si esgales en toutes leurs parties que celles de metal : & celles de soye sont encore plus inegales que celles de boyau.

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D. Inst., III, 01
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104
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1

Quant à celles [les chordes] d'or & d'argent, il n'est pas necessaire de les employer aux instrumens, d'autant que celles de leton ne leur cedent en rien, & qu'elles montent plus haut.
Le nombre des chordes est esgal au nombre des touches, de sorte que si l'on augmente les vnes, il faut aussi augmenter les autres : par exemple, si l'on fait vne Epinette iuste, qui ayt toutes les consonances, & les dissonances en leur perfection, il faut 73. chordes, afin que chaque octaue en ait 19. comme nous monstrerons en expliquant les clauiers de l'Epinette, & au traicté de l'orgue parfait, où nous ferons voir qu'il faut 97. chordes sur l'Epinette, & autant de tuyaux sur l'orgue pour iouër à toutes sortes de tons, toutes sortes de pieces de Musique, & pour vser du genre chromatic & enarmonic.

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D. Inst., III, 01
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104
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2

Quant à la tension des chordes, elles doiuent estre tenduës sur les deux cheualets qui sont collez sur la table.
Or les ouuriers ont seulement de 7 ou 8 grosseurs de chordes, & consequemment font seruir vne mesme grosseur à 6. ou 7. sons differens. Mais si l'on vouloit monter vne Epinette auec toute sorte de perfection selon les regles harmoniques, il faudroit autant de differentes grosseurs de chordes, comme l'Epinette a de sons, à sçauoir 49 ; car la proportion de ces grosseurs & longueurs doit suiure la raison des interualles, qui sont entre les sons : de sorte que si la plus grosse a 16. parties en sa circonference, la moindre doit seulement auoir vne partie, parce que 16. est à 1. comme le son plus graue de l'Epinette est au plus aigu.

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D. Inst., III, 01
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104
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3

Il faut dire la mesme chose de la longueur des chordes, dont la proportion est vn peu mieux gardee par les ouuriers, que celle de la grosseur, mais non parfaitement. Or il n'est pas besoin d'expliquer ces proportions plus particulierement, parce qu'elles dependent de la cognoissance du monochorde, dont nous auons desia parlé dans vn autre lieu. Et qui sçait la raison des degrez de l'octaue, à sçauoir d'vt, re, mi, fa, sol, &c. sçait la raison des grosseurs & des longueurs qu'il faut donner aux chordes ; par exemple, si la plus longue est de quatre pieds, la plus courte doit estre d'vn demy pied.
Il faut dire la mesme chose de la Harpe, dont les chordes sont esgalement disposees, de sorte que l'on peut dire que l'Epinette est vne harpe couchee & renuersee, ou au contraire, que la harpe est vne Epinette renuersee quant aux chordes, car elles sont differentes quant aux autres choses : mais ie feray vn discours particulier de la longueur & grosseur que doiuent auoir les chordes de l'Epinette, & des autres instrumens pour rendre vne harmonie parfaite, & donneray deux tables pour ce sujet dans la suite de ce Liure.

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D. Inst., III, 01
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104
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4

Ie viens maintenant au temperament de l'Epinette, qui est semblable à celuy de l'orgue, aussi a-elle autant de touches sur chaque octaue comme l'orgue ; c'est pourquoy ie diray seulement icy que l'on doit approcher le plus pres que l'on peut de la verité de chaque consonance, à laquelle butte toute sorte de temperament, car ie reserue le reste pour le traicté des Orgues.

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D. Inst., III, 01
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104-105

Quant à l'accord, qui depend dudit temperament, il n'est pas aysé de le representer, [p105] tant parce que les Maistres se seruent de differentes methodes pour accorder l'Epinette, que par ce que cet accord suppose vne oreille iuste & delicate, n'y ayant nulle science qui apprenne à accorder cet instrument sans le iugement de l'oreille, si ce n'est que les poids attachez au bout de chaque chorde nous donnent tous les sons iustes, mais les chordes s'aslongent tousjours, & ne peuuent subsister long-temps sans rompre ; & puis elles deuroient auoir vne parfaite proportion en longueur & en grosseur, & vne parfaite esgalité, & finalement les poids apporteroient vn trop grand embarras & trop d'incommodité, neantmoins i'expliqueray apres ce qui appartient à ces poids, & aux tensions qu'ils donnent aux chordes.

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D. Inst., III, 01
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105
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1

Quelqu'vn pourroit dire que sçachant la grosseur des cheuilles, & la longueur des chordes, l'oeil sans l'oreille pourroit tesmoigner la tension de chaque chorde, en voyant combien de tours feroit la chorde autour de chaque cheuille, & par consequent combien chaque chorde auroit de tension, laquelle semble estre aussi grande comme le volume de la chorde s'est diminué. Car il faut remarquer que la chorde que l'on bande, deuient plus deliee à proportion que l'on la bande dauantage : de sorte que si, par exemple, elle deuient plus courte de moitié par la tension, elle sera aussi plus deliee de moitié qu'auparauant.

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D. Inst., III, 01
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105
Sequence: 
2

Mais ie responds que l'oeil n'est pas assez subtil quoy qu'aydé du compas, ou des autres instrumens, pour discerner combien la tension de chaque chorde la rend plus deliee que deuant, n'y quelle longueur de chorde enuironne les cheuilles. Et puis quand l'on sçauroit ces particularitez, elles ne suffiroient pas pour venir à l'accord de l'Epinette, d'autant qu'il y a des chordes qui font plus de tours de cheuille que les autres, & consequemment qui deuiennent plus deliees, encore qu'elles ne montent pas tant, comme demonstre l'experience aux chordes plus deliees, qui montent beaucoup plus haut à proportion, que ne font les plus grosses, encore qu'on ne leur donne pas tant de tours de cheuille : mais ie parleray encore de cette maniere d'accorder.

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D. Inst., III, 01
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105
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3

Or c'est chose asseuree qu'il n'y a point d'autre meilleur moyen d'accorder l'Epinette qu'en supposant vne bonne oreille, qui entende la iustesse des accords : ce que l'on fait en cette maniere. Premierement il faut commencer à la premiere touche ou chorde de la seconde octaue, & accorder les 10. ou 12. chordes qui suiuent en montant de Quinte en Quinte : de sorte que l'on approche le plus pres de la iuste Quinte qu'il sera possible pour treuuer les autres accords.

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D. Inst., III, 01
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105
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4

Puis il faut tellement diuiser les Quintes en Tierces maieures & mineures, que les maieures soient vn peu affoiblies, & les mineures vn peu plus fortes que ne desire leur iustesse : & ces 10. ou 12. touches estant d'accord l'on doit mettre les autres à leurs Octaues : mais il faut expliquer plus particulierement de quelle methode l'on doit vser pour accorder cet instrument bien viste & iustement, ce que les ioüeurs estiment vn grand secret de l'art : car puis que nous traictons les sciences liberalement, nous ne deuons rien oublier de ce qui peut seruir à la perfection de la Musique. C'est pourquoy nous apporterons la maniere la plus iuste, & la plus prompte de toutes celles qui ont esté experimentees iusques à maintenant en expliquant la figure de l'Epinette.

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D. Inst., III, 01
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105-106

Or le secret du temperament consiste à sçauoir qu'elles consonances l'on doit tenir iustes, fortes, ou foibles, afin de temperer tout le Systeme, ou le Clauier : c'est pourquoy chaque note, ou chaque son qu'il faudra fortifier, ou diminuer, [p106] ou tenir iuste, aura pour marque l'vne de ces trois dictions, fort, iuste, ou foible. Il faut maintenant voir si l'on peut mettre les ieux differents, que plusieurs ont essayé d'introduire dans l'Epinette, comme l'on a fait dans l'orgue, afin qu'elle comprint toutes sortes d'instrumens à chorde, comme l'orgue contient toutes sortes d'instrumens a vent, mais l'vn n'a pas reüssi comme l'autre, quelques Panodions & autres instrumens que l'on ayt inuenté pour ce sujet.

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D. Inst., III, 01
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106
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1

Or le ieu des Violes est le plus excellent de tous ceux que l'on y peut augmenter, car quant à celuy des Luths & des Harpes, l'Epinette les imite assez, lors qu'elle est montee de chordes à boyau.

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D. Inst., III, 01
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106
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2

Mais auant que de resoudre si l'on y peut ioindre le ieu des Violes, il faut considerer tous les ieux que l'on y pratique maintenant. Et premierement le ieu commun, qui est le fondement des autres, peut estre appellé ieu fondamental, auquel on adiouste quelquefois vn semblable ieu à l'vnisson, ou vn autre à l'octaue, afin de le rendre plus remply d'harmonie, & afin qu'il ayt vn plus grand effet dans les concerts & sur les auditeurs.

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D. Inst., III, 01
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106
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3

L'on peut encore adiouster vn autre ieu de Tierce ou de Quinte, dont les vns pourront auoir des chordes de luth, & les autres de leton ou d'acier. Voila tous les ieux dont on s'est seruy iusques à present, lesquels on peut appeller double, ou triple Epinette. Et ces ieux se ioüent tous ensemble, ou separément comme l'on veut, en les ouurant ou fermant par de certains ressorts & registres que l'on tire, ou que l'on pousse selon la volonté du facteur & du Musicien.
Quant au ieu de Violes, l'on peut se seruir de chordes à boyau ou de leton, mais la difficulté consiste à treuuer le moyen de faire vn archet, qui touche les chordes aussi fort, ou aussi doucement que l'on desire.

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D. Inst., III, 01
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106
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4

Or la main du Musicien peut suppleer à cela [treuuer le moyen de faire vn archet, qui touche les chordes aussi fort, ou aussi doucement que l'on desire], car à proportion que l'on baissera ou que l'on haussera les chordes, afin de rencontrer l'archet, elles seront touchees plus rudement, ou plus delicatement. Et l'on peut s'imaginer vn mouuement par des ressorts, ou auec le pied, qui fera tousiours cheminer l'archet, afin qu'il touche chaque chorde aussi long-temps que l'on voudra. Mais ie ne croy pas que l'on puisse suppleer les gentillesses de la main gauche, ny les fredons, & les douceurs & rauissements des coups de l'archet, dont les excellens ioüeurs de Violes & de Violons, comme les Sieurs Maugards, Lazarin, Bocan, Constantin, Leger & quelques autres, rauissent l'esprit des auditeurs.

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D. Inst., III, 01
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106
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5

Les Allemans sont pour l'ordinaire plus inuentifs & ingenieux dans les Mechaniques que les autres Nations, & particulierement ils reüssissent mieux à l'inuention des instrumens de Musique : ce que ie peux confirmer par la maniere qu'ils ont treuuee depuis quelque temps, pour faire ouyr des ieux entiers de Violes sur les Clauecins, quoy qu'vn seul homme en touche le clauier, comme celuy d'vne autre Epinette.
Mais ils n'ont nul besoin d'archet, d'autant qu'ils mettent quatre ou cinq rouës paralleles aux touches, quoy que plus hautes que les touches : or on presse les chordes si peu que l'on veut sur lesdites rouës, qui font durer le son aussi long-temps que le doigt demeure sur la touche, & qui le renforcent ou l'affoiblissent selon que l'on presse la touche plus ou moins fort. La circonference des roües est couuerte de cuir bien collé pour seruir d'archet, & on les fait tourner auec le pied par le moyen d'autres roües & d'autres ressorts, qui sont cachez souz les rouës. Ce qui est mal aysé à comprendre sans en voir la figure, dont ie parleray apres.

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D. Inst., III, 01
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107
Sequence: 
1

Quant à l'vsage de l'Epinette, elle a cela d'excellent, qu'vn seul homme fait toutes les parties d'vn concert, ce qu'elle a de commun auec l'orgue & le luth : mais ces accords & ses tons approchent plus pres de la iuste proportion de l'harmonie qu'ils ne font sur le luth ; & l'on fait plus aysément plusieurs parties sur l'Epinette, que sur ledit luth.

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D. Inst., III, 01
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107
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2

Quant à la Harpe, elle semble surpasser l'Epinette, en ce qu'elle retient les sons de resonnement plus long temps, car ses sons s'amortissent par le drap qui est pres de la plume, quoy que l'on puisse dire que ce resonnement de la Harpe nuit plustost qu'il ne sert à l'harmonie, si le ioüeur ne l'esteint auec ses doigts, ausquels suppleent les petits morceaux de drap de l'Epinette, qui a cela par dessus l'orgue, qu'elle ne depend point du vent ny des soufflets, qui contraignent les Organistes à auoir de l'ayde pour ioüer, dont l'Epinette n'a nullement besoin, car elle represente sans beaucoup de bruit tout ce qui se fait sur l'orgue ; & puis elle est plus aysee à toucher & à accorder, ioint qu'elle couste beaucoup moins.

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D. Inst., III, 01
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107
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3

Elle [l'Epinette] peut semblablement estre meslee auec toutes sortes d'instruments, comme enseigne l'experience, & mesme auec les voix, qu'elle regle & qu'elle maintient dans le ton ; mais elle se mesle particulierement auec les Violes, qui ont le son de percussion & de resonnement comme l'Epinette.
On peut dire la mesme chose des Clauecins & des Manichordions, dont celuy cy est plus foible de son que l'Epinette, & celuy-là est plus fort pour l'ordinaire. A quoy l'on peut adjouster pour la façon & pour la forme, que le clauier est à l'vne des extremitez du clauecin, & que dans l'Epinette & dans le Manichordion il est au milieu. Or quant à la bonté de l'Epinette, elle depend de plusieurs conditions & particularitez, mais particulierement des barres qu'on met dessouz la table, d'autant qu'il est difficile de barrer parfaictement les Epinettes, & est l'vn des plus grands secrets de l'art, dont ie laisse la recherche aux Facteurs.

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D. Inst., III, 02
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107
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4

PROPOSITION II. Expliquer la figure de l'Epinette, & la science du Clauier tant parfaict, qu'imparfaict, & quel il doit estre pour ioüer toutes sortes de compositions de Musique dans leur parfaicte iustesse, sans vser du temperament.

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D. Inst., III, 02
Page: 
107-108

Or i'ay choisi la moindre Epinette de toutes celles que l'on a coustume de faire, pour en representer icy la figure : car sa plus grosse chorde n'a guere qu'vn pied de long entre ses deux cheualets. Elle n'a que 31. marche dans son clauier, & autant de chordes sur sa table ; de sorte qu'il y a cinq touches cachees à raison de la perspectiue, à sçauoir trois des principales, & deux feintes, dont la premiere est couppee en deux ; mais ces feintes seruent pour descendre à la Tierce, & à la Quarte de la premiere marche, ou du C sol, afin d'arriuer [p108] iusques à la 3. octaue, car les 18. marches principales font seulement la Dix-huictiesme, c'est à dire la Quarte sur deux octaues.

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D. Inst., III, 02
Page: 
108-109

Cette figure estant regardee de son point de perspectiue est si facile à comprendre, qu'il n'est pas besoin d'vn plus long discours. Il faut seulement remarquer que l'on se met au milieu pour en sonner, au lieu que l'on se met au bout du clauecin, comme l'on void dans sa figure : mais la disposition des clauiers monstre assez de quel costé l'on se doit mettre pour les toucher.
Or A C B D monstrent le corps de cet instrument, dont le couuercle est Z Y A C, qui se ioint à l'ais du derriere auec des crampons mis en A, & en [p109] C.

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D. Inst., III, 02
Page: 
109
Sequence: 
1

Les chordes H N M sont attachees par vn bout aux petites pointes de fer que l'on void au long du dos sur la table E G M C, & de l'autre bout elles sont entortillees aux cheuilles de fer E F : mais leur longueur qui sert à l'harmonie est bornée & determinée par le cheualet E N, dont les deux bras font vn angle obtus, & L M monstre l'autre cheualet chargé de petites pointes qui bornent la longueur, & l'harmonie des chordes. G H fait voir les mortaises par où passent les sautereaux. Le P & l'O seruent de couuercle aux deux petits coffres, esquels on met les chordes, le marteau de l'Epinette, ou ce que l'on veut.

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D. Inst., III, 02
Page: 
109
Sequence: 
2

Quant au Clauier, (qui contient toutes les marches, dont les principales ou diatoniques sont marquees de leurs propres lettres) i'ay osté l'ais de dessus, qui se pose sur la ligne V X, afin que l'on veist le bout des petites pointes de fer qui attachent les marches, dont les Chromatiques ou les Feintes sont beaucoup plus etroites.
Or chaque Octaue de l'Epinette a 13. notes, comme l'on void aux 13. qui sont grauees sur l'ais Q R, lequel se leue pour fermer le clauier, & qui appartiennent à la premiere octaue marquee par C sol vt fa : ce qui est si aysé à entendre qu'il n'est pas besoin de nous y arrester : car il suffit d'auoir des yeux pour voir les 12 demy tons esquels cette octaue est diuisée par le moyen des dieses, qui sont entre les notes diatoniques, & qui representent les feintes du clauier.

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D. Inst., III, 02
Page: 
109
Sequence: 
3

Mais il ne faut pas oublier l'accord de cet instrument [l'Epinette] qui sert aussi pour le Clauecin & pour le Manichordion, & qui monstre la methode & la pratique dont vsent les plus grands Maistres de cet art.
Ie dis donc premierement que l'on peut prendre le ton, ou le son de Fa vt pour le fondement de l'accord. En second lieu qu'il faut faire le quinte foible en haut, c'est à dire que la 2. note qui est en C sol ne monte pas iusques à la quinte iuste du monochorde.

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D. Inst., III, 02
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109
Sequence: 
4

Cette diminution est signifiee par la lettre d, qui enseïgne que toutes les notes, sur lesquelles il se rencontre, doiuent estre affoiblies & diminuees. Quant aux Octaues qui paroissent entre les quintes, elles sont tousiours iustes. Or les cinq regles d'enhaut contiennent l'accord des marches diatoniques, comme celles d'en bas contiennent l'accord des feintes, c'est à dire des marches Chromatiques. Apres que l'on a accordé la premiere quinte de F à C, l'on accorde le C d'en bas à l'octaue, & de ce C on monte à la quinte en G, duquel on passe au G d'enhaut ; & puis on accorde le D de dessus à la quinte auec le mesme G.

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D. Inst., III, 02
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109
Sequence: 
5

En 7. lieu on descend de ce D à l'octaue en bas : & de ce D d'enbas on monte à l'A d'enhaut, auec lequel il fait la quinte, & de cet A l'on monte à l'A superieur pour faire l'octaue. En 8. lieu l'on monte du D inferieur à la quinte en E, duquel on descend à l'octaue, c'est à dire à l'E d'enbas : & finalement l'on monte de cet E à la quinte en ♮ mi, qui fait le douziesme rang de ces cinq lignes.
L'on vient apres à l'accord des Feintes en commençant à l'F superieur, auec lequel il faut accorder le ♭ fa à la quinte : mais cette quinte doit estre augmentee au lieu que les precedentes ont esté diminuées : c'est pourquoy i'ay mis la lettre f dessouz pour signifier qu'elle doit estre forte, de mesme que celle qui suit.

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D. Inst., III, 02
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109
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6

Quant aux trois autres elles sont marquées par d, parce qu'elles doiuent estre diminuées. Le 7I. ou dernier rang de notes signifie le defaut de l'accord ou du clauier. Or l'on peut faire les Epinettes aussi grandes que l'on veut, par exemple de 4. ou 5. pieds de long ; mais ce que l'on pourroit desirer en cellecy, s'expliquera si clairement dans le traicté du Clauecin qui suit, qu'il n'est pas necessaire d'allonger ce discours.

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D. Inst., III, 03
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110
Sequence: 
1

PROPOSITION III. Expliquer la figure, les parties, le Clauier & l'estenduë du Clauecin.
Cette figure represente le double Clauecin, comme l'on void aux deux rangs de chordes qu'il contient, dont le premier est entortillé aux premieres cheuilles Z Z, & l'autre aux secondes L L. De là vient qu'il y a quatre cheualets, à sçauoir deux droits N M, & P O : & les deux autres, à sçauoir S T & V X, qui determinent la longueur harmonique des deux rangs de chordes. On les appelle cheualets à crosse à raison de leur figure.
Les moindres chordes sont arrestées par les pointes T T, & les plus grandes par celles qui suiuent la ligne G B, dont celles de dessouz B H &c. ne paroissent pas, à raison du costé du Clauecin qui les couure. G F E signifie le costé continué, lequel n'a peu estre veu sans mettre le Clauecin de biais & de trauers, comme il est icy en Perspectiue.

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D. Inst., III, 03
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110
Sequence: 
2

Quant aux sautereaux R Q, qui sont quasi paralleles au second cheualet droit, duquel ils sont fort proches, ils entrent par 49. petits trous, dont on perce vne regle de bois qui s'appelle mortaise ; or chaque sautereau à deux morceaux d'escarlate ou d'autre drap, afin d'estouffer & d'amortir le son des deux rangs de chordes. Et parce que la perspectiue n'a pas permis de les representer de telle sorte que ceux qui n'en ont point veu puissent comprendre leur figure, i'en ay mis vn tout entier à costé gauche, à sçauoir K O, qui porte perpendiculairement sur le bout k de la marche g h k, dont g h est le bout, sur lequel frappe le doigt pour le faire baisser, & pour faire sauter le sautereau K O, mais l'on double le bout de la marche K d'vn morceau de drap, afin que le sautereau ne fasse point de bruit en retombant : i monstre le lieu de la pointe qui arreste la marche.

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D. Inst., III, 03
Page: 
110
Sequence: 
3

Quant au sautereau, il est difficile de comprendre toutes ses parties, si l'on ne le considere de bien pres, car il est composé de sept pieces, à sçauoir du bras K O, de la languette l m, qui a vn petit ressort fait de soye de porc, ou de quelque autre crin assez fort, lequel va rencontrer la pointe l, apres qu'il a esté passé par deux petits trous que l'on fait dans le sautereau, fort pres du petit bois l m. La quatriesme partie est vne pointe de fer qui passe à trauers le sautereau & le petit bois, auquel il sert d'essieu ; la plume m est la cinquiesme qui touche les chordes & les fait sonner. La sixiesme consiste en vn petit morceau de cuir collé sur la graueure du bas de la vuideure, afin d'empescher le bruit de la pointe l, qui retombe dessus apres auoir frappé la chorde, & la septiesme est le morceau de drap n, qui est dans vn trait de sie fait au haut de l'vne des dents du sautereau.

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D. Inst., III, 03
Page: 
110-112

Le coffre, ou l'assemblage du Clauecin est E F G H B D K, & C A I est le lieu sur lequel sont les marches, dont les branches esgales à la branche h k, sont cachées par la piece de deuant, sur laquelle i'ay mis l'estendüe du clauier par les lettres ordinaires de la main harmonique C D E F, &c. qui signifient C fa vt, D sol re, &c. & qui appartiennent aux 29. marches principales, ou Diatoniques, qui sont marquées des nombres 1, 2, 3, &c. Quant aux feintes qui sont entre les grandes marches, & qui seruent pour faire les demy tons, ou les degrez chromatiques, il y en a vingt, dont la premiere est la feinte de c, [p112] c'est pourquoy il est marqué d'vn c auec vne diese, ce qui arriue semblablement aux feintes qui suiuent par exemple à celle de D, de F, &c.

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D. Inst., III, 03
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112
Sequence: 
1

Or apres auoir expliqué les principales parties du Clauecin, qui a ordinairement cinquante marches, il ne faut pas oublier le marteau f c d, puis qu'il sert à l'accorder & à la monter, car l'on fait les boucles de la chorde auec son petit crochet, comme l'on void à la chorde b. Sa teste c sert à frapper sur les cheuilles L L, & Z Z pour les faire entrer dans le sommier : a en marque la panne, & e f le manche qui est percé en quarré au bout f, afin qu'il torde les cheuilles qui sont rondes, sans qu'elles puissent couler.

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D. Inst., III, 03
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112
Sequence: 
2

L'estendüe du Clauecin, & conséquemment de l'Epinette à grand clauier est marquée en bas par les cinq notes qui representent les quatre Octaues dudit clauier, car il y a vne Octaue de la premiere ou plus basse note à la seconde, & puis vne autre Octaue de la seconde à la troisiesme, &c. ce que monstrent les nombres qui sont sur les notes, dont le 4. signifie que la note finale fait la Vingt-neufiesme, c'est à dire quatre Octaues auec la premiere : ce qui est tres-aysé à comprendre par le moyen des trois clefs differentes de cet accord.

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112
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3

Les instrumens antiques qui sont en haut, à sçauoir S Z Y, & p q r monstrent les formes particulieres de leurs Harpes ou Cithares, qui ont esté prises sur les marbres anciens d'Italie, comme i'ay desia dit en expliquant les autres. Mais celle qui a ses chordes disposées en triangles, & qui commencent à n, est extraordinaire.

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D. Inst., III, 03
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112
Sequence: 
4

Or il n'est pas necessaire de remarquer que l'on fait maintenant des Clauecins, qui ont sept ou huict sortes de ieux, & deux ou trois clauiers, & que ces ieux se varient, & se tirent, se ioignent, meslent ensemble comme ceux de l'Orgue, par le moyen de plusieurs petits registres, cheuilles & ressorts, qui font que les sautereaux ne touchent qu'vn seul rang de chordes, ou qu'ils en touchent deux, ou plusieurs, par ce que la veüe & l'experience en fera plus comprendre que le discours : c'est pourquoy ie viens à l'explication d'vne autre sorte d'Epinette, dont on n'vse pas en France, & qui est en vsage dans l'Italie, apres auoir remarqué que plusieurs ayment mieux se seruir du seul Clauier qui se pousse, & se tire pour changer les ieux, que des susdits ressorts, qui ne sont pas ordinairement si iustes ; que d'autres vsent de 2. ou 3. clauiers pour varier les ieux, & qu'il y a encore plusieurs inuentions qui se peuuent adiouster à cet instrument, dans lequel on a remarqué plus de quinze cens pieces toutes differentes.

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Volume: 
D. Inst., III, 03
Page: 
112
Sequence: 
5

Mais i'expliqueray plusieurs autres choses qui appartiennent à l'Epinette dans le discours de la Pratique, dans lequel ie monstreray tout ce qui se peut faire dessus, & particulierement les plus grandes diminutions, dont les doigts sont capables pour les accords, qui se peuuent faire des deux mains, & toutes les gentillesses que l'on a coustume de pratiquer.

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Volume: 
D. Inst., III, 03
Page: 
113-114

COROLLAIRE. Expliquer vne nouuelle forme d'Epinette dont on vse en Italie.
Cette figure monstre la forme de l'Epinette D A B C E, dont il n'y a que 19 marches qui se voyent mais il ne faut pas prendre garde à ce nombre, ny à celuy des chordes, par ce qu'il suffit qu'elle serue pour en comprendre la construction. Or elle se tient perpendiculairement comme la Harpe, lors que l'on iouë : de sorte que les sautereaux K N viennent par vn mouuement parallele de derriere en deuant, lors qu'on pese sur les marches D M. Il n'y a point d'autre table que F H G, dont I est la Rose, car les chordes sont toutes perpendiculaires en l'air, de sorte qu'elles [p114] font vne tres-douce harmonie, quand le vent vient à les frapper, & qu'il ayde aux sons naturels que font les plumes des sautereaux. L'on peut faire vne infinité d'autres sortes d'Epinettes, dont ie laisse la recherche aux Facteurs, afin d'expliquer plus particulierement ce qui est en vsage, tant en la France, que dans les autres lieux de l'Europe Chrestienne.

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Volume: 
D. Inst., III, 04
Page: 
114
Sequence: 
1

PROPOSITION IV. Expliquer la figure, la matiere, & les parties du Manichordion.
Le Manichordion a son clauier de quarante neuf ou cinquante touches ou marches, comme le Clauecin, quoy qu'il soit different en beaucoup de choses, comme l'on void dans cette figure A B C D, dont les deux costez sont A C E, & C H T B, & les deux autres, qui sont de B à D, & de D à E ne paroissent pas. La table R D M soustient les cinq cheualets, marquez par 1, 2, 3, 4, & 5, dont le premier est le plus haut, & les autres vont en se diminuant. Les 70. chordes sont entortillées aux 79. cheuilles R S, & toutes les chordes passent & sont appuyées sur les cheualets. Les sept petites mortaises M K seruent pour faire sortir les sons, & les chordes vont aboutir à P Q O.

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Volume: 
D. Inst., III, 04
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114
Sequence: 
2

Mais il faut remarquer ce qui est de plus particulier en cet instrument [le manichordion], à sçauoir les morceaux d'escarlatte ou d'autre drap, qui couurent toutes les chordes dans l'espace compris entre O N P M, & qui estouffent tellement leur son, qu'il ne se peut entendre de loin, & qu'il est fort doux : c'est pourquoy il est fort propre pour ceux qui desirent d'apprendre à ioüer de l'Epinette sans que les voisins le puissent apperceuoir ; de là vient que l'on peut la nommer Epinette sourde, ou muette.

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Volume: 
D. Inst., III, 04
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114
Sequence: 
3

Or encore qu'il y ayt 70. chordes, neantmoins chaque marche ou sautereau n'a pas la sienne particuliere, d'autant qu'il y a plusieurs rangs de deux chordes à l'vnisson, & que le 37. & 38. n'ont qu'vn mesme rang de chordes : ce qui arriue semblablement à la 39. 40. 42. 43. 44. 45. 47. 48. & 49. Toutes les autres marches ont vn rang particulier de chordes. Quant aux cheualets, le premier porte six rangs de chordes, c'est à dire 12. Le second en a 9. rangs, ou 18. dont les 8. premieres sont redoublées & retorces, de sorte qu'il y a 20. chordes en double. Le 3. cheualet soustient 8. rangs de chordes, c'est à dire 16. Le 4. contient trois rangs, ou 6. chordes, & le cinquiesme en a 9. rangs : or l'on peut faire vn seul cheualet au lieu de ces cinq.

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Volume: 
D. Inst., III, 04
Page: 
114
Sequence: 
4

Il faut encore remarquer que la perspectiue cache les cinq premieres marches, car le clauier [du manichordion] est esgal à celuy du Clauecin. Mais les marches qui sont attachees auec les pointes de fer I L, n'ont pas des sautereaux comme luy, mais ils ont des crampons comme celuy d'airain Y V, qui touchent & haussent les chordes. L'on void les 49. crampons dans la ligne M N. X monstre la pointe de la marche Z, que l'on met dans le diapason, qui paroist vn peu par delà les crampons, R L monstrent les pointes qui attachent les marches à vne barre de dessouz : & les lignes tortuës qui vont depuis ces pointes iusques aux crampons, signifient les branches des marches. A B I & H peuuent seruir de coffrets pour mettre des chordes, des cheuilles, vn marteau & plusieurs autres choses.

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Volume: 
D. Inst., III, 04
Page: 
114-116

Quant aux chordes [du manichordion], leur son est determiné par la partie qui est depuis les [p116] crampons iusques aux cheualets, car la partie qui reste entre les crampons, & l'escarlate ne sonne point : de là vient qu'vne mesme chorde peut seruir à plusieurs crampons, dont chacun fait vn son different selon la distance du point où il touche la chorde, iusques au cheualet de ladite chorde.
Il n'est pas necessaire d'expliquer l'estenduë de cet instrument qui est en bas, par ce qu'elle ne differe qu'en disposition de clefs d'auec celle du Clauecin, c'est pourquoy ie viens à son estenduë d'enhaut, laquelle i'ay mise tout au long sans laisser aucune note : c'est à dire que i'ay remply les quatre Octaues d'en bas, en mettant onze notes entre les deux notes de chaque Octaue.

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Volume: 
D. Inst., III, 04
Page: 
116
Sequence: 
1

Les 29. nombres, dont chacun est vis à vis de chaque note, monstrent l'ordre desdites notes, qui toutes sont esloignées l'vne de l'autre d'vn demy ton : de sorte que ie ne pense pas qu'il y ayt autre chose necessaire pour entendre tout ce qui appartient à cet instrument.

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Volume: 
D. Inst., III, 04
Page: 
116
Sequence: 
2

Il faut encore remarquer le petit cheualet droit O P, lequel est couuert de pointes de fer, qui determinent la longueur harmonique des chordes, qui passent iusques à Q O, où leurs boucles sont attachées a d'autres pointes de fer. Quant aux morceaux de drap qui sont signifiez par tous les points compris entre P O N, on les entortille autour des chordes, afin de les assourdir, & d'empescher qu'elles ne sonnent depuis le drap iusques aux crampons marquez dans la ligne N M, dont chacun est de leton semblable au crampon Y V. L'on a coustume de leuer le petit couuercle D S pour mettre des chordes dans son petit coffre : mais ces menuës pratiques dependent de la volonté du Facteur.

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Volume: 
D. Inst., III, 04
Page: 
116
Sequence: 
3

Ie viens au couuercle E G F D [du manichordion], sur lequel l'on void vne Octaue grauee, laquelle est remplie de tous les degrez Diatoniques, Chromatiques, & Enharmoniques que l'on peut s'imaginer, ou qui peuuent seruir à perfectionner & augmenter l'harmonie, & les gentillesses des instrumens : car chaque ton y est diuisé en quatre dieses, & chaque demy ton en deux.

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D. Inst., III, 04
Page: 
116
Sequence: 
4

Par exemple le premier VT RE [gravé sur le couvercle E G F D du manichordion], qui est de C sol en D sol, comprend cinq notes, dont la premiere est esloignée de la seconde d'vne seule diese, c'est pourquoy i'ay marqué cette diese d'vne simple croix, comme la 3. note d'vne double croix, à raison qu'elle est esloignée de la premiere note de deux dieses. Semblablement vne triple croix precede la 4. note, par ce qu'elle en est esloignée de trois dieses ; de sorte qu'il ne reste plus qu'vne diese de la 4. à la 5. note pour acheuer le ton.

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D. Inst., III, 04
Page: 
116
Sequence: 
5

Mais il faut remarquer que i'ay vsé de trois sortes de notes, afin qu'elles monstrent la distinction de chaque degré, & que l'on voye dans vn moment à quel genre chaque note appartient : car toutes celles qui valent vne mesure, & que l'on appelle semibreues, ou blanches sans queuë, appartiennent au genre Diatonic, dont elles constituent les 8. sons.

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D. Inst., III, 04
Page: 
116
Sequence: 
6

Les Minimes ou blanches à queuë signifient les cinq sons du genre Chromatic, & les douze noires appartiennent aux douze sons Enharmoniques : de sorte que cette Octaue à 25. sons, & consequemment 24. interualles : ce qui est si aysé à comprendre qu'il n'est pas besoin d'vn plus long discours.

(

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Volume: 
D. Inst., III, 05
Page: 
117
Sequence: 
1

PROPOSITION V. Expliquer trois sortes de Clauiers ordinaires de l'Epinette, qui font les Consonances, & les autres interualles dans leur plus grande iustesse.

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Volume: 
D. Inst., III, 05
Page: 
117
Sequence: 
2

Il est certain que l'on peut faire vne aussi grande diuersité de Clauiers, comme il y a de differens Systemes, mais ie veux icy me restreindre à la Practique, & monstrer premierement toutes les Consonances iustes qui se peuuent rencontrer sur les clauiers ordinaires, en quoy ils sont imparfaits, & quelles Consonances leur manquent : c'est pourquoy ie fais premierement voir la premiere Octaue du clauier de l'Epinette en sa propre grandeur, d'où l'on iugera facilement quelle est la grandeur de son clauier, qui contient 4. Octaues semblables à celle-cy, laquelle a treze marches, dont les cinq d'enhaut s'appellent Feintes, à raison qu'elles sont entre les degrez Diatoniques, dont la premiere commence par C qui est marqué de 3600.

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D. Inst., III, 05
Page: 
117
Sequence: 
3

Car i'ay mis les nombres Harmoniques de chaque son, ou de chaque chorde sur les 13. marches, afin que l'on sçache la distance des sons, & que l'on voye clairement qu'il est impossible de ioüer iustement de l'Epinette, si l'on ne met vn plus grand nombre de marches sur son clauier. Car soit que l'on dispose les interualles suiuant les nombres de ce premier clauier, qui sont sur chaque marche, ou selon les nombres de cet autre clauier qui suit, c'est chose asseuree que l'on ne peut trouuer les Tierces & les Sextes, tant maieures que mineures, en plusieurs endroits, où elles sont necessaires ; ce que i'explique tres-clairement dans le liure des Orgues : c'est pourquoy ie n'en parle pas icy.

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Volume: 
D. Inst., III, 05
Page: 
117-118

Ie diray seulement qu'il faut adiouster les deux Clauiers precedens, & n'en faire qu'vn des deux, si l'on veut auoir toutes les Tierces & les Sextes iustes, comme ie monstre dans la table qui suit, dans laquelle i'explique les interualles de chaque marche, & toutes les consonances qui sont iustes dans ce troisiesme Clauier composé des deux precedens ; d'où il sera aysé de conclure ce qui manque à l'vn & à l'autre. Car la comparaison des nombres qui sont dessus auec ceux de ce troisiesme Clauier ou Systeme, monstre les raisons de [p118] chaque interualle consonant ou dissonant, comme l'on void dans ce troisiesme Clauier qui a dix-sept touches, afin de contenir les Feintes des deux precedens : mais parce que tous ne sçauent pas comme il faut trouuer les raisons de ces nombres, ie les explique icy si clairement qu'il n'est pas quasi possible qu'on ne les entende.

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Volume: 
D. Inst., III, 05
Page: 
118

Car l'on void les interualles, qui sont entre chaque note, ou diction, & consequemment les touches, qui font les Consonances, ou les Dissonances dans leur iustesse : ce que i'explique encore dans la table qui suit, & qui commence par le C sol vt fa d'en bas. [C sol vt fa, Semiton mineur, ♮ mi, demiton moyen, B fa, demiton maieur, A mi la re, demiton mineur, x a, diese, x g, demiton mineur, G re sol vt, demiton moyen, x g, diese, x f, demiton mineur, F vt fa, demiton maieur, E mi la, demiton mineur, x e, diese, x d, demiton mineur, D la re sol, demiton moyen, x d, diese, x c, demiton mineur, C sol vt fa].

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Volume: 
D. Inst., III, 05
Page: 
118-119

Vsage du Clauier, ou de l'Octaue qui a 17. marches.
[De C à xe : Tierce mineure, De C à E : Tierce maieure, De C à F : Quarte, De C à G : Quinte, De C à xa : Sexte mineure, De C à A : Sexte maieure, De C à C : Octaue - De D à F : Tierce mineure, De D à xf : Tierce maieure, La Quarte iuste manque, De D à A : Quinte, De D à B : Sexte mineure, La maieure manque, De D à D : Octaue - De E à G : Tierce mineure, De E à xg : Tierce maieure, De E à A : Quarte, De E à ♮ : Quinte, De E à C : Sexte mineure, De E à xc : Sexte maieure, De E à E : Octaue - De F à xa : Tierce mineure, De F à A : Tierce maieure, De F à B : Quarte, De F à C : Quinte, De F à xd : Sexte mineure, La maieure manque, De F à F : Octaue - De G (manque La Tierce mineure), De G à ♮ : Tierce maieure, De G à C : Quarte, De G à D : Quinte, De G à xe : Sexte mineure, De G à E : Sexte maieure, De G à G : Octaue - De A à C : Tierce mineure, De A à xc : Tierce maieure, La Quarte manque, De A à E : Quinte, De A à F : Sexte mineure, De A à xf : Sexte maieure, De A à A : Octaue - [p119] De ♮ à D : Tierce mineure, De ♮ à xd : Tierce maieure, De ♮ à E : Quarte, La Quinte manque, De ♮ à G : Sexte mineure, De ♮ à xg : Sexte maieure, De ♮ à ♮ : Octaue].



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Volume: 
D. Inst., III, 05
Page: 
119
Sequence: 
1

De l'Vsage des Feintes pour les Consonances.
[De xc à E : Tierce mineure, De xc à xf : Quarte, De xc à xg : Quinte, De xc à A : Sexte mineure, De xc à xc : Octaue - De xd à F : Tierce maieure, De xd à xg : Quarte, De xd à xa : Quinte, De xd à B, Sexte maieure, De xd à xd : Octaue - De x d à xg : Quarte, De x d à ♮ : Sexte mineure, De x d à xd : Octaue - De xe à G : Tierce maieure, De xe à xa : Quarte, De xe à C : Sexte maieure, De xe à xe : Octaue - De xf à A : Tierce mineure, De xf à xc : Quinte, De xf à xf : Octaue - De xg à xd : Quarte, De xg à xe : Quinte, De xg à F : Sexte maieure, De xg à xg : Octaue - De x g à xc : Quarte, De x g à xd : Quinte, De x g à E : Sexte mineure, De x g à xg : Octaue - De xa à C : Tierce maieure, De xa à xd : Quarte, De xa à xe : Quinte, De xa à F : Sexte maieure, De xa à xa : Octaue - De B à xd : Tierce mineure, De B à F : Quinte, De B à xg : Sexte mineure, De B à B : Octaue].

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Volume: 
D. Inst., III, 05
Page: 
119
Sequence: 
2

Il est bien aysé de marquer toutes les Dissonances, puis qu'elles se trouuent en tous les endroits que ie n'ay pas mis. Mais puis qu'il y a tant de touches ou de lettres qui n'ont pas toutes les Consonances, & que la Quarte ou la Quinte, ou l'vne des Tierces & des Sextes manquent si souuent, il est euident que ce Clauier n'est pas assez parfait, & qu'il y faut encore adiouster de nouuelles touches, si l'on veut pratiquer le genre Diatonic en sa perfection : comme il arriuera si l'on vse du Clauier, ou de l'Octaue qui a dix-neuf marches, dont i'ay expliqué l'vsage dans les discours que i'ay fait des trois genres de Musique : c'est pourquoy ie n'en parle pas icy, & l'on peut voir ce que i'en dis dans le Liure des Orgues.

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Volume: 
D. Inst., III, 05
Page: 
119
Sequence: 
3

Ie remarqueray seulement que le Clauier ne doit pas estre estimé parfaict iusques à ce que chacune des touches principales, ou chaque lettre Diatonique fasse toutes les Consonances iustes tant en bas qu'en haut. Mais ie le reserue pour le traité des Orgues, d'où l'on le peut icy transporter, si l'on desire auoir vne parfaite Epinette.

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Volume: 
D. Inst., III, 05
Page: 
119-120

Quant au Clauier imparfait & temperé dont on vse, il est representé par les deux premiers, dont chacun n'a que treze touches à l'Octaue : pourueu que l'on n'ayt nul esgard aux nombres qui sont sur les marches, & qui leur ostent le temperament, dont ie traicte si clairement dans [p120] le liure des Orgues, qu'il n'est pas besoin d'en parler icy, l'Epinette n'ayant rien de particulier qui ne soit aussi dans leurs Clauiers.

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Volume: 
D. Inst., III, 06
Page: 
120
Sequence: 
1

PROPOSITION VI. Determiner de quelle longueur & grosseur doiuent estre les chordes d'Epinette pour rendre vne parfaite harmonie.

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Volume: 
D. Inst., III, 06
Page: 
120
Sequence: 
2

Il y a ordinairement quatre Octaues entieres sur l'Epinette, & vingt-neuf touches sur son Clauier, sans conter les Feintes, qui sont simples ou doubles : quand elles sont simples, il y en a cinq sur chaque Octaue, de sorte que l'Octaue de l'Epinette est diuisee en treize sons, chordes, ou marches : par consequent il faut que les treize chordes soient toutes differentes en longueur & grosseur, si l'on veut auoir vne parfaite harmonie […]

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Volume: 
D. Inst., III, 06
Page: 
120
Sequence: 
3

[…] & par ce qu'il y a quarante neuf marches en quatre Octaues [sur l'Epinette], il faut quarante neuf sortes de chordes, dont les longueurs & les grosseurs diminuent tousiours depuis la plus grosse iusques à la plus deliee, car bien que la tension puisse suppleer la longueur ou la grosseur, comme l'on experimente sur les Epinettes, les Harpes, & les autres instrumens à chorde, dont on vse maintenant : neantmoins l'harmonie sera plus parfaite, si l'on obserue les raisons harmoniques à la longueur, & à la grosseur des chordes.

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Volume: 
D. Inst., III, 06
Page: 
120
Sequence: 
4

Quant à la longueur [des chordes d'Epinette], elle approche plus pres de cette proportion, quoy que la difference de ces longueurs ne soit pas harmonique, car la chorde qui fait C fa vt, n'est pas sesquidixiesme de celle, qui fait D sol re, & celle-cy n'est pas sesquineufiesme de celle qui fait l'E la mi, &c. Quant à la grosseur, on obserue encore moins la proportion harmonique dans la difference des grosseurs, qu'en celle des longueurs, car les chordes de mesme grosseur seruent souuent à sept ou huict touches : au lieu qu'elles deuroient garder la mesme raison que les longueurs, pour rendre vne parfaite harmonie.

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Volume: 
D. Inst., III, 06
Page: 
120
Sequence: 
5

La table qui suit contient les grosseurs, & les longueurs que doiuent auoir les chordes ; mais il faut supposer la longueur, & la grosseur de la premiere, c'est à dire de la plus grosse, afin de regler toutes les autres sur elle. L'on peut aussi prendre la derniere, c'est à dire la plus deliee, & la plus courte pour fondement de l'harmonie, car l'on peut commencer par telle chorde que l'on voudra. Or la table qui suit, & qui suppose que la plus grosse chorde a 1/5 de ligne, & 5. pieds de longueur, comme a pour l'ordinaire la plus grosse chorde des Epinettes & des Clauecins, monstre la grosseur & la longueur de chaque chorde […]

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Volume: 
D. Inst., III, 06
Page: 
120
Sequence: 
6

[…] car la premiere colomne contient le nombre des chordes : la seconde, la proportion que les chordes ont entr'elles, c'est à dire la proportion des sons : la troisiesme, la longueur des chordes : la quatriesme, la grosseur desdites chordes diuisees en miliesmes, c'est à dire en mille parties : la cinquiesme reduit les grands nombres de la precedente en moindres termes : la sixiesme contient les diametres desdites chordes qui sont diuisez en miliesmes : & la septiesme les reduit en moindres nombres.
Or puis que le diametre de la 1, ou plus grosse chorde est 1/5 de ligne, soit la ligne diuisée en 1000. parties, le diametre de ladite chorde sera 200, & son Tour ou sa grosseur sera 629. & ainsi des autres chordes iusques à la 4. Octaue en haut, selon la proportion qui suit, auec la reduction en moindres parties de proche en proche.

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D. Inst., III, 06
Page: 
121

Mais parce que les chordes [de l'Epinette] sont quelquesfois plus grosses que de 3/5 de ligne, comme il arriue aux Clauecins de 12, de 15, ou de 20. pieds, ie mets icy vne autre table, qui commence par la plus grosse chorde de la table precedente de 3/5 de ligne, & contient toutes les chordes qui ont mesme raison entr'elles que les sons des instrumens ; & parce qu'il ne se rencontre tout au plus que quinze differentes grosseurs de chordes, i'adiousteray deux autres Colomnes dans cette table, afin qu'elle ayt sept colomnes, dont la premiere est pour le nombre des chordes : la seconde pour la grosseur, dont la moindre est de 3/5 de ligne : la troisiesme donne la mesme chose en moindres termes : la quatriesme contient leur diametre en grands termes, & la cinquiesme les reduit en moindres termes ; or toutes ces Colomnes appartiennent aux quatre dernieres colomnes de la table precedente, auec lesquelles elles pouuoient estre continuées.

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