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tierce | Mersenne, Marin - Harmonie universelle - 1636 - C. Cons., I, 01, p001-002

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Et puis, quel plaisir y a t'il d'apperceuoir que l'air est battu deux ou trois fois par vne chorde, pendant qu'il est battu quatre ou six fois par vn autre ? L'oreille & l'imagination n'est-elle pas plus contente de demeurer en repos que d'estre trauaillee par quarante-huit battemens d'air d'vn costé, & par nonante & six de l'autre, comme il arriue lors qu'on fait l'Octaue ?
D'ailleurs, pourquoy les battemens qui font la Seconde ou la Septiesme mineure, sont-ils plus des-agreables que ceux qui font la Quinte ou la Tierce ? Certainement cette difficulté n'est pas l'vne des moindres de la Musique ; car si le vray plaisir consiste à conseruer ou à faire croistre ce que nous auons, il est difficile de monstrer que les battemens d'air qui font les Consonances, aident à nostre conseruation, et augmentent la perfection du corps ou de l'esprit, puis que l'on experimente que ceux qui n'aiment pas la Musique, & qui la tiennent inutile, ou tout au plus indifferente, ne sont pas moins parfaits du corps & de l'esprit que ceux qui l'aiment auec passion.
Neanmoins il est bien difficile de rencontrer des hommes qui prennent autant de plaisir à oüir vne Dissonance, par exemple la Seconde, ou le Triton, comme à oüir l'Octaue & la Quinte. Et bien que l'on en puisse trouuer qui maintiennent qu'il n'y a point de plaisir à oüir les Consonances, ou qu'il n'y a point de Consonances, ny de Dissonances, ils seront contraints d'auoüer que le Triton, ou les Secondes sont plus des-agreables que la Douziesme, ou l'Octaue, s'ils se donnent le loisir de considerer & d'oüir ces interualles, et consequemment s'ils ne veulent pas confesser qu'il y a des interualles agreables, ils auoüeront qu'il y en a de plus agreables les vnes que les autres, ou qu'ils s'imaginent [p002] quelque chose de moins des-agreable dans l'Octaue que dans le Triton ; & s'ils n'osent rien asseurer, de peur de faire tort à la liberté Pyrrhonienne, & de perdre l'Vnisson & l'equilibre de leur esprit, dont ils vsent pour suspendre leur iugement, ils n'oseront pas nier que les interualles dissonans ne soient des-agreables, & que les Consonances ne soient agreables, puis qu'ils craignent autant l'affirmation que la negation.